Victor Charreton
Bourgoin, 1864 - Clermont Ferrand, 1936
Victor Charreton est le fils d’un géomètre. Il passe son enfance à Chaumont et va à l’école à Bourgoin. En 1885, il entame des études de droit à l’université de Grenoble et devient en 1892 avocat à la cour d’appel de Lyon. Il peint depuis l’enfance et reçoit les conseils d’Ernest Hareux et plus tard de Louis Japy. En 1902, il abandonne sa carrière d’avocat pour se consacrer à la peinture. La même année, il s’installe à Paris. Chaque été, à partir de 1912, il séjourne dans sa maison de St-Amand-Tallende, près de Clermont-Ferrand, d’où est originaire sa femme. Il voyage également à l’étranger : en Algérie en 1905, en Espagne et en Angleterre en 1912, en Belgique et en Hollande en 1913, visitant au passage de nombreux musées. Il visite également la Corse et l’Allemagne. Il mène une vie d’esthète et d’homme de culture, amateur de poésie et de musique. En 1914, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur.
Charreton est un paysagiste de tradition lyonnaise qui aime les empâtements sensuels. Dans ses œuvres, il cherche à capter des effets fugaces et momentanés, comme ceux obtenus par les impressionnistes : des effets à différents moments de la journée et en différentes saisons, tels que le crépuscule et la neige. Dans sa jeunesse, il peint les environs de Bourgoin, mais son mariage en 1893 le conduit en Auvergne où il peint les paysages caractéristiques de la région. Les paysages d’Auvergne représentent environ les deux tiers de sa production. L’école de Murols, du nom d’un village d’Auvergne, s’est principalement formée autour de lui entre 1910 et 1925. Habile à saisir les infimes changements de temps, il sait aussi capter l’esprit de nouveaux lieux. Outre son Dauphiné natal et son Auvergne d’adoption, les paysages de l’Île-de-France et de Paris – Montmartre, le Jardin du Luxembourg, le Parc Montsouris -, mais aussi de la Provence, de la Creuse et de la Bretagne l’ont séduit. En revanche, aucune trace de ses voyages à l’étranger n’a été retrouvée. Il serait erroné de penser qu’il n’a peint que de jolies scènes de carte postale dans les régions qu’il a visitées ; au contraire, il recherchait les qualités intimistes d’un lieu, choisissant peut-être un hameau tranquille, avec un humble pont sur une étendue d’eau anonyme, ou un arbre ordinaire à côté d’une maison délabrée. Il peignait des paysages d’automne flamboyants, avec une palette de couleurs somptueuses, mais préférait également les scènes enneigées, leur exact opposé chromatique. Au début de sa carrière, il peint des scènes crépusculaires et des contre-jours en demi-teintes et des couchers de soleil brumeux. Au fur et à mesure de son évolution artistique, il accorde de plus en plus d’importance à la lumière et à la couleur. À cet égard, son œuvre s’inscrit dans la continuité de celle de Ravier et, comme Guillaumin, elle est presque un précurseur du fauvisme ou peut être considérée comme complice de celui-ci, à l’instar de l’œuvre de Maurice Marinot. Son coup de pinceau évolue en même temps que son utilisation de la couleur, qui devient de plus en plus vibrante ; par exemple, son penchant pour les teintes violettes et, plus tard, ses contrastes de couleurs frappants. Son coup de pinceau devient plus visible et il supprime les détails insignifiants pour faire ressortir les formes qui composent la composition générale. Pour les historiens de l’art, il n’est pas classé parmi les novateurs qui ont succédé aux impressionnistes, comme Gauguin, Seurat, Van Gogh ou Cézanne. Plus âgé que Matisse, qui était déjà lui-même de loin l’aîné des Fauves, Charreton s’est tenu à l’écart de ce qu’il considérait comme leurs excès. Il se situe à la charnière de deux siècles : la fin du siècle de l’impressionnisme et le début des bonds du fauvisme.
Sa vie et les grands thèmes de son œuvre en témoignent, mais il a choisi d’être un peintre régional ; ainsi, son talent et ses qualités apparaissent plus clairement qu’ils ne l’auraient été s’il avait choisi une carrière plus ambitieuse. Parallèlement à sa peinture, il écrit une pièce de théâtre en trois actes intitulée Le Puits de Montrouge, qui est jouée à Bourgoin en décembre 1883.
Charreton fait ses débuts au Salon de Lyon en 1894 avec Matin à Montpeyroux. La même année, il commence à exposer à Paris au Salon de la Société des Artistes Français, avec Soirée d’octobre. Il obtient une mention honorable en 1910, une médaille d’argent en 1912, une médaille d’or en 1913 et une mention hors concours en 1914. Il devient également membre du comité et du jury et y expose jusqu’à sa mort.
Sources : Documentation musée des Beaux-Arts de Lyon, Tomaselli Collection, Bénézit.