Paul Borel
Lyon, 1828 - Lyon, 1923
Jeune orphelin de riches parents commerçants à la Mulatière, Paul Borel rencontre à l’école dominicaine de Saint-Thomas d’Aquin à Oullins un mystique d’envergure, l’abbé Lacuria, et un milieu de catholiques fervents. En 1844, il en rapport avec Louis Janmot et préfère son atelier distingué à l’École des Beaux-Arts. Borel assiste sans doute à l’élaboration de la fresque de l’Antiquaille, La Cène par Janmot (1846). Borel opte pour la vocation artistique et un art tourné vers l’élévation des âmes vers Dieu, mission compatible avec son amour pour Adèle, épousée après sept ans d’attente, mais qui meurt en 1858, le laissant tristement disponible. Il a sans doute vu Janmot peindre à Saint-Polycarpe (1856) des personnages de trois mètres de haut et dont les dessins préparatoires évoluent vers la monumentalité. Cette seconde manière marque Borel, et certains portraits non signés sont difficilement attribuables à l’un ou l’autre. En 1879, le protégé devient le protecteur, en présentant Janmot à Félix Thiolliers, futur éditeur du Poème de l’âme. Borel sera l’exécuteur testamentaire de Janmot.
En 1860, Borel consacre un héritage important à financer une chapelle dans l’école Saint-Thomas-d’Aquin, confiée à Pierre Bossan qui prévoit des espaces pour un cycle pictural que l’artiste réalisera en une vingtaine d’années. Il s’interrompt pour d’autres décors : les Carmes (1864), la coupole d’Ars (autour de 1896) est le seul chantier entrepris hors de la région lyonnaise. Borel semble réserver la technique de la gravure pour s’exprimer plus librement que sur les murs Quelques gravures diffusent ses peintures monumentales. Le thème de chaque décor mural s’accorde aux souhaits des commanditaires attachés à leurs fondateurs et à leurs patrons. À la chapelle des Augustines de Versailles, on trouve saint-Augustion, les saintes Julienne et Claire de Montefalcone ; à l’église Saint-Paul de Lyon, les trois épisodes cruciaux, le chemin de Damas, la prédilection, le martyre ; et dans la chapelle d’Oullins, les grandes figures dominicaines, saint Vincent Ferrier ou Pie V et les deux saintes Catherine.
Des scènes sacrées évoquent l’activité humaine : à l’hôpital Saint-Joseph, la Guérison de l’aveugle incite à l’espoir. À Ars, outre l’inévitable Phimimène, une peinture consacrée à son adorateur est plus familière : les parents du petit Jean-Marie Vianney, médusés, découvrent l’enfant en prière près des vaches. Borel est particulièrement attaché à la participation des hommes aux œuvres divines de salut, il le prouve par sa générosité. Ce rôle de l’homme est exalté dans les épisodes des pèlerins d’Emmaüs : auditeurs captivés, ils incitent le Christ à révéler sa nature divine. Mieux que l’anatomie corporelle, qu’il domine médiocrement, le portrait convient à son talent comme “reflet de l’âme”. De l’homme, il donne des images énergiques. Il magnifie la femme par une beauté sculpturale, imcompatible avec toute coquetterie aguicheuse. L’amicale conspiration d’amis (Auguste Prénat) signale Borel à Joris-Karl Huysmans. Peu charmé par “la lourdeur de l’ensemble, par l’aspect soporeux et désuet des tons”, l’écrivain admire “des portraits magnifiques de saints […] étonnant par la force de prières, par la puissance de sainteté qui rayonne d’eux. Borel était le peintre des saints monastiques ; son art, d’habitude un peu lent, s’essorait dès qu’il les approchait et planait avec eux.” (Joris-Karl Hysmans, La Cathédrale, [1898], cité in Félix Thiollier, Paul Borel, Lyon, H. Lardanchet, 1913 p.47)
Sources : Documentation musée des Beaux-Arts de Lyon, Tomaselli Collection, Bénézit.